Le 18 février 2025, le Sommet Expérience (CX, UX, UI) a rassemblé des expert·es et des professionnel·les pour échanger sur les grandes tendances en expérience client, expérience utilisateur et design d’interface.
Dans un monde où la technologie a pris beaucoup (trop?) de place et où les attentes de la clientèle sont souvent insatisfaites, un enjeu majeur a émergé des discussions : comment concilier innovation technologique et connexion humaine?
La plupart des client·es estiment que leur expérience avec les entreprises s’est dégradée au cours des trois dernières années.
Selon Mathieu Paradis, la technologie ne facilite pas toujours les interactions entre les entreprises et leurs client·es. Son usage intensif, combiné à l’utilisation croissante des réseaux sociaux, contribue à un sentiment général de solitude, de méfiance et de frustration.
« La technologie n’a pas tenu sa promesse : elle devait rapprocher les humains et simplifier les interactions, mais, finalement, elle nous éloigne. »
– Mathieu Paradis, chef, Design d’expérience et stratégie, TD Assurance
Face à ce constat, plusieurs entreprises revoient leur stratégie d’expérience client pour renforcer les interactions humaines. Starbucks, avec sa nouvelle stratégie intitulée « Back to Starbucks Basics », mise sur un service recentré sur le bon café et sur des interactions chaleureuses avec les baristas. TD Assurance réinvente ses expériences pour les axer sur l’humain, et non sur la technologie. Pour les Fermes Lufa, cette stratégie centrée sur l’humain fait ses preuves dans le contexte actuel de hausse du coût du panier d’épicerie, notamment grâce à un service client 100 % humain, sans chatbot ni intelligence artificielle, offrant ainsi un accompagnement personnalisé à chaque client·e.
Les expert·es s’entendent : la recherche client est essentielle pour concevoir des expériences pertinentes, durables et inclusives. Elle doit être vue comme un investissement stratégique. C’est le cas chez TD Assurance, qui partage ses démarches de recherche sur TD Invente.
« Inclure les client·es dans la conception permet de mieux comprendre leurs besoins et d’y répondre. C’est moins coûteux en temps et en argent que d’avoir à faire des corrections par la suite. »
– Anik Pelletier, experte-conseil en communication inclusive
Cependant, Philippe Genois, président d’Inputkit, souligne que les client·es sont sursollicité·es par des sondages longs et mal conçus. Pour contrer cette « survey fatigue », il est important de bâtir des sondages ultra-personnalisés et très courts, et de fermer la boucle de rétroaction (c’est-à-dire d’informer la clientèle des améliorations apportées à la suite des sondages).
Dans un contexte économique incertain, les équipes d’expérience doivent démontrer aux dirigeants que les stratégies centrées sur la clientèle, le personnel et les communautés profitent aussi aux actionnaires.
Selon Catherine Gauthier, les parcours client sont un levier puissant pour aligner les visions et identifier les points à améliorer.
« Les parcours client sont un outil puissant dans une démarche d’expérience client, car ils contribuent à la construction d’une vision commune sur les écarts d’expérience à combler et sur les résultats attendus. »
– Catherine Gauthier, associée, Méthodes d’innovation collaborative et expérience client, Interface&Co
Un design inclusif répond aux besoins des personnes ayant des contraintes spécifiques, mais améliore aussi l’expérience de tout le monde.
« Les sous-titres sur les vidéos en sont un bon exemple : conçus pour les personnes malentendantes, ils servent aussi à tous les gens qui se trouvent dans un contexte où lire est plus pratique que d’écouter. »
– Anik Pelletier, experte-conseil en communication inclusive
Marin Destison, consultant sénior en expérience client et expérience utilisateur, conseille de s’appuyer sur des alliés internes, comme les équipes ESG, et de relier le design inclusif aux indicateurs de performance clés (KPI) et/ou aux valeurs de l’entreprise.
La Ruche, une plateforme de sociofinancement, utilise des outils d’intelligence artificielle pour optimiser des moments clés de son expérience. Par exemple, la rédaction du projet par l’entrepreneur est une étape essentielle, car c’est ce qui donnera envie aux investisseurs potentiels de soutenir le projet. Mirego a intégré un assistant d’aide à la rédaction pour créer les descriptions les plus engageantes et attrayantes possibles.
« L’humain reste indispensable, même avec une utilisation avancée de l’intelligence artificielle, notamment pour identifier les moments pertinents, entraîner les modèles, vérifier ce que l’IA livre, etc. »
– Jean-Benoit Dubé, directeur, Stratégies numériques, Mirego
L’IA peut aussi faciliter la recherche qualitative, essentielle à la création d’expériences satisfaisantes, mais dont le coût et la durée constituent parfois des freins. Noémie Clavet, spécialiste en expérimentation et optimisation chez Adviso, a présenté Synthetic Users, un outil qui génère des insights en seulement 20 minutes. Selon elle, ces résultats sont à 85 % comparables à ceux d’une recherche traditionnelle, mais doivent être complétés par des études menées en collaboration avec des humains.
« L’IA rend la donnée qualitative plus accessible, mais il faut l’utiliser avec intelligence et nuance. »
– Noémie Clavet, spécialiste en expérimentation et optimisation, Adviso
Le Sommet Expérience 2025 a donc mis en lumière l’importance de replacer l’humain au centre des stratégies d’expérience. L’interaction humaine, la recherche client, le design inclusif et l’intelligence artificielle sont autant de leviers à exploiter pour offrir des expériences plus riches et engageantes.